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La dépendance affective : Apprendre à m'aimer

 

Nous entendons de plus en plus souvent le caractère "dépendance affective" depuis la parution du livre "Ces femmes qui aiment trop" de la psychothérapeute Robin Norwood.
La dépendance est une pathologie dont il faut s'en débarrasser.

Les personnes qui se pensent être atteintes de ce mal cherchent à en sortir en se raisonnant et en tentant d'éviter les personnes qui les attirent naturellement.

voici quelques extraits de témoignages:
 

"Après un an de séparation, je souffre encore beaucoup. Je pense à elle chaque jour. Est- ce de la dépendance affective?"

"Je tombe facilement amoureux et dépends beaucoup des femmes. Est-ce ça qu'on appelle être dépendant affectif?"

"J'ai besoin de contacts sexuels avec les femmes. C'est une question d'équilibre. Est-ce de la dépendance affective?"

"Je ferai tout pour ne pas déplaire à la femme que j'aime et tout pour lui plaire. Je m'oublie. Ce n'est pas grave. Il me semble que ce serait plus grave de la perdre."



Êtes-vous dépendant affectif:

Beaucoup de personnes s'inquiète de savoir si elles sont dépendantes, et en se persuadant d'avoir trouvé des similitudes, elles se collent un étiquette.

Cette certitude à un effet, qui pourrait-être  plus grave: elle amène ces personnes à remettre en question leurs besoins affectifs. Tout ce qui concerne leur attachement, leur soif de relation, leur besoin d'aimer et d'être aimées leur apparaît comme pathologique. Ces gens se demandent même s'ils sont normaux d'avoir des réactions émotives fortes.
Pourtant nous ne pouvons assimiler la dépendance affective à celle des addictions des drogues ou alcool.


En réalité, l'alcoolique et le toxicomane ont recours aux stupéfiants et aux euphorisants pour éviter le contact avec leurs besoins affectifs et leurs émotions. Ces besoins sont typiquement négligés au point de prendre une grande intensité. En consommant des substances toxiques, ces personnes se distraient de leurs besoins affectifs et de la souffrance occasionnée par leur manque. On pourrait comparer ce qu'ils font à l'assoiffé du désert qui s'injecterait de l'héroïne pour ne plus souffrir de la soif. Il mourrait déshydraté, mais peut-être sans éprouver clairement sa souffrance!

Il est certain que les stupéfiants et les stimulants ne combleront jamais les besoins affectifs. Même les alcooliques et les toxicomanes ne sont pas dupes de cela. Mais ils ont souvent peur et se sentent démunis devant l'ampleur de leurs besoins. Malheureusement, l'accent qu'on met sur la dépendance physique dans le cas de ces assuétudes contribue à dévier l'attention des véritables raisons qui ont mené à la consommation abusive.

En plus, lorsqu'on considère ces assuétudes comme des maladies, on voile en grande partie la responsabilité de la personne dans son choix d'évitement. On concentre alors le travail thérapeutique sur l'arrêt du comportement pathologique plutôt que sur l'apprivoisement des besoins affectifs et l'apprentissage à les combler. En agissant ainsi, on s'empêche de régler le problème de fond.

En laissant croire que la "dépendance affective" équivaut à une assuétude, on empêche de trouver des solutions saines aux insatisfactions affectives et aux façons de réagir qui la composent. On laisse croire qu'il s'agit d'une maladie plutôt que d'une tentative maladroite de trouver satisfaction. On prive ainsi la personne de tout moyen réel d'y remédier par elle-même. On laisse entendre qu'il s'agit d'une forme d'assuétude qui ne peut être résolue que par un contrôle de la volonté et un évitement systématique des tentations. Ceci interdit à toutes fins pratiques au "dépendant affectif" de répondre à ses besoins émotifs fondamentaux.

C. La dépendance au plan affectif


Les êtres vivants ont besoin d'air et d'eau pour survivre. Ils sont dépendants de ces éléments et de leur environnement où ils les trouvent. Ils peuvent même devenir "obsédés" par ces éléments dans certaines circonstances.

Imaginons la situation suivante. En expédition dans le désert, nous arrivons au bout de nos réserves d'eau. Si nous n'avons pas de moyen de nous ravitailler à proximité, il est certain que nous deviendrons obnubilés par l'eau. Plus le manque se fera sentir, plus notre vie, nos pensées et tous nos efforts seront orientés vers un seul but: trouver une oasis.

Peut-on qualifier notre groupe de "dépendants physiques"? Nous n'y penserons certainement pas, car il nous semble normal d'avoir besoin d'eau et de nous mobiliser pour en trouver. Il est sain, si on en manque dramatiquement, que sa recherche devienne la priorité de notre vie. Ce que nous trouverions anormal, ce serait de danser pour faire tomber la pluie, de tourner en rond en espérant trouver de l'eau, ou d'implorer l'eau d'apparaître... On considérerait certainement comme pathologique le comportement d'un membre du groupe qui demeurait passif en souhaitant ardemment que l'eau se rende à sa bouche. S'il persistait dans cette méthode jusqu'à risquer sa vie, on le croirait auto-destructeur.


1. L'importance des besoins affectif

Les êtres vivants n'ont pas que des besoins physiques, ils ont également des besoins affectifs. Ceux-ci ne sont pas aussi palpables et sont encore mal connus. Mais on en sait assez, à l'heure actuelle, pour conclure à l'importance d'y répondre. On sait par exemple, qu'un bébé tombe dans un état de torpeur ("marasme") s'il n'est pas soigné, avec une attitude au moins bienveillante. Il peut même en mourir. On sait aussi pourquoi un enfant risque de développer des problèmes psychiques graves s'il reçoit, du parent qui en prend soin et sur une période prolongée, un message fondamental de haïne camouflé dans un discours positif.

L'enfant a besoin, pour se développer harmonieusement, d'être traité comme une personne à part entière et d'avoir l'opportunité de répondre à ses besoins. C'est même indispensable à sa santé mentale. Mais c'est vrai aussi chez les adultes.

Nous continuons d'avoir des besoins affectifs tout au long de notre vie. Nous devons les satisfaire pour conserver notre équilibre affectif et notre santé mentale. C'est même important pour notre santé physique! De plus en plus, on découvre l'effet néfaste des manques affectifs sur la santé physique.

Ainsi, l'adulte de 30 ans a encore besoin d'affection et il en aura toujours besoin. À 50 ans une personne a encore besoin d'être appréciée et reconnue. Quel que soit son âge, celui qui vit une existence peu nourrissante, tend à déprimer. Qui n'a pas connu quelqu'un qui a sombré dans la dépression ou même est mort par manque affectif?

Je pense à cet homme qui demeure replié dans sa solitude par peur du contact dont il a besoin. Je le vois perdre sa vitalité et se maintenir en vie grâce à des occupations répétitives et terre à terre. Je pense aussi à cette jeune femme abandonnée par son amant. Je la revois, piaffant indéfiniment dans la peine et la rage, en négligeant ses besoins affectifs laissés en plan au départ de son amant. En persévérant dans cette attitude, elle peut se rendre à la dépression et même jusqu'au suicide. Je me rappelle aussi ce cadre d'entreprise usé, brisé, et devenu défaitiste à force de voir ses efforts et réussites banalisés. Je vois le vieillard qui se laisse dépérir parce qu'il n'a plus la possibilité de contribuer à quelque chose qui soit valable à ses yeux.

Tous ces gens ont besoin d'affection, d'être importants pour quelqu'un qu'ils aiment ou encore d'être reconnus par quelqu'un qu'ils estiment. L'absence de satisfaction entraîne toutes sortes de symptômes et de troubles psychiques et physiques, tout comme les carences au plan physique le font.


2. Les variations dans les besoins

Lorsqu'ils sont comblés, les besoins sont la plupart du temps invisibles. Je ne sens pas la faim, mon besoin de manger disparaît quand je viens de prendre un bon repas. Je suis également peu consciente de mon besoin d'être aimée si je vis avec des personnes dont l'affection me comble. J'apprécie alors tout simplement mon état de satisfaction et j'en profite sans même y penser. Tout comme au plan physique, le besoin ne fait surface que lorsqu'il est en souffrance, lorsqu'il ne trouve pas de réponse adéquate.

L'urgence et l'intensité du besoin varient aussi d'un moment à l'autre ou d'une période à l'autre de notre vie. Ils varient même selon les personnes avec qui nous sommes en contact. Comme au plan physique, c'est le degré de satisfaction actuel qui détermine combien chaque besoin est crucial, intense ou urgent. L'individu dont le système manque sérieusement de fer se met, par exemple, à rêver de persil; il se jette sur la première botte de persil qui lui tombe sous la main. De la même façon, l'individu qui souffre d'un manque affectif a tendance à être obnubilé par ce besoin.

J'ai déjà expliqué, dans d'autres articles, pourquoi les besoins importants inassouvis donnaient souvent lieu à une préoccupation obsédante et à des comportements répétitifs menant inexorablement à l'impasse. Voyez plus particulièrement:

 


D. Le vrai problème de la "dépendance affective"


On parle habituellement de "dépendance affective" lorsqu'une personne dont les besoins affectifs sont urgents et intenses répète constamment un scénario non satisfaisant qui la conduit à une impasse. Mais ces caractéristiques ne sont pas réservées aux personnes qu'on étiquette "dépendantes affectives".

Toute personne arrive à l'âge adulte avec des déficits affectifs substantiels. Chacune cherche naturellement à répondre à ces carences. La recherche d'assouvissement prend souvent un caractère urgent à cause de l'intensité du manque qu'elle veut combler. Tout ça est relativement normal pour tout adulte; il faut plus pour qu'on puisse parler d'un problème de "dépendance affective".

C'est à la longue, si cette recherche demeure stérile, qu'elle devient destructrice. Parce qu'elle s'appuie sur des moyens inadéquats, elle est alors vouée à l'échec, tout comme le serait celle d'un assoiffé qui ferait des incantations pour obtenir de l'eau dans le désert. Ce n'est pas le fait d'avoir besoin d'eau qui est le problème. De même, ce n'est pas le fait d'avoir besoin de l'autre qui est pathologique chez la personne dite "dépendante affective". Ce n'est pas le fait d'avoir besoin d'affection, d'être reconnu comme ayant une valeur ou comme étant aimable par une autre personne qui crée l'impasse.

Ce n'est pas d'avantage le fait de choisir des personnes peu adéquates pour combler ses besoins qui est le vrai problème. La dépendance est inhérente à la vie; les besoins qui en font partie sont normaux et les personnes élues pour les combler sont choisies d'instinct. Cet instinct est fiable car il la mène justement vers des personnes qui permettent de compléter des situations incomplètes (de régler ses transferts).

Mais si ce n'est ni le besoin, ni le choix des personnes pour y répondre qui sont problématiques, où donc est le problème? Les impasses destructrices de la "dépendance affective" sont bien connues; il doit bien y avoir quelque chose qui ne va pas!

Ce qui est au coeur du problème, ce qui en fait un comportement pathologique, c'est le fait de ne pas porter son besoin. C'est cet évitement fondamental qui donne lieu à toutes sortes de comportements disfonctionnels et même aberrants.

Ceci n'est pas toujours bien clair. La personne consciente de son besoin d'être aimée et qui se "désâme" pour obtenir l'affection peut nous apparaître comme "portant son besoin". Elle est toute au service de l'autre, elle se sacrifie souvent au nom de son amour, elle renie ce qu'elle ressent pour ne pas déranger l'autre. Plus: elle lui dit très clairement qu'elle veut qu'il l'aime et le met en situation de le lui prouver. Que pourrait-elle faire de plus pour prouver à l'autre combien il est important et pour obtenir son amour en retour?

Mais justement, il ne s'agit pas de faire plus, mais de faire autrement. Voyons ce qui me fait dire que cette personne en mal d'amour n'assume pas son besoin, même si elle semble y accorder une importance considérable.


1. Peu de contact avec ce qu'elle ressent

Cette personne est généralement "mal dans sa peau". Le plus souvent, elle ne ressent à peu près que l'angoisse ou l'anxiété. Et elle agit à partir de cette angoisse: demandes pressantes à l'autre, gestes généreux à son égard, contrôle pour obtenir ce qu'elle désire et calmer par là son angoisse.

Le plus souvent, elle cherche avant tout à se débarrasser de son angoisse. Il est rare qu'elle tente de trouver ce que cache cette angoisse (Voir "L'angoisse et l'anxiété" ). Si elle le faisait, elle découvrirait diverses préoccupations, divers sentiments. De la même façon, elle s'abandonne rarement à ressentir complètement ses émotions (Voir "La vie d'une émotion"). Si elle le faisait, elle comprendrait mieux ce qui se passe en elle et serait davantage en mesure d'identifier ses besoins (et non seulement ce qu'elle veut de l'autre). Une fois ses besoins plus clairs, elle saurait aussi ce qu'elle doit exprimer (plutôt que de mettre toute son énergie à faire exprimer l'autre).

Cette personne évite ainsi le contact avec son expérience parce qu'elle "est mal" avec elle-même. Non seulement a-t-elle peur du contact avec elle, mais en même temps, elle ne s'accorde pas assez d'importance pour vouloir s'arrêter sur ce qu'elle ressent. Elle cherche donc avant tout à s'éviter. Mais plus elle s'évite de cette façon, plus elle devient inconfortable et angoissée.

En plus, elle est profondément convaincue que ce sont la considération de l'autre, son amour et son respect, qui apaiseront son angoisse et la rendront confortable. Paradoxalement, en attendant ainsi de recevoir de l'autre des marques de considération sans oser déclarer ouvertement qu'elle les recherche, elle perpétue sa faible estime d'elle-même. Elle manifeste peu de respect et de considération pour ce qu'elle vit en le reniant aussi facilement.

Dans ce contexte, on ne peut s'étonner qu'il soit presque impossible pour cette personne d'identifier ses besoins. On n'est pas surpris, non plus, qu'il lui soit très difficile de les exprimer directement.


2. Une expression camouflée

Tout comme elle refuse ce qu'elle ressent et le traite comme peu important, cette personne a les mêmes objections à l'égard de son ressenti. Elle ne se considère pas assez importante pour communiquer ce qu'elle vit vraiment. Elle ne parvient pas à faire, à celui dont elle veut l'amour, une expression claire et authentique comme:
 

  • "Je souhaite de tout mon être que tu m'aimes! J'ai l'impression que ton amour serait la preuve que j'ai de la valeur. Je t'assure que parfois j'ai l'impression de n'être pas plus importante qu'un verre de terre sur cette planète. Un seul regard de toi... un seul regard de toi où je lis un peu d'appréciation et je me sens pousser des ailes."

Elle choisit plutôt de tourner son attention sur lui et de gagner son amour en faisant ce qu'elle pense qu'il veut. Elle espère que ses efforts, son abnégation ou sa soumission lui amèneront l'affection, l'appréciation et la valorisation. Elle garde caché ce qu'elle vit réellement, y compris, bien sûr, ses réactions "négatives".

Si on sait comment se développe l'estime de soi (Voir "Fidèle à moi-même") on comprend qu'il n'y a aucune chance que cette stratégie donne les résultats visés. Non seulement en s'aliénant ainsi elle n'obtiendra jamais l'estime et l'affection de l'autre, mais encore elle n'en aura pas pour elle-même.

Ça semble paradoxal, mais ce n'est pas moins vrai pour autant: la personne qui agit de cette façon ne se compromet pas émotivement. Exposer ses besoins et ce qu'elle ressent l'apeure trop. Elle est parfois même terrorisée à l'idée du refus, du jugement ou du rejet de la part de l'être important. Le refus implicite qu'elle subit continuellement lui apparaît plus vivable que le refus clair et explicite. Il lui permet de garder l'espoir et de persister dans son effort.

Ce refus d'implication émotif entretien le cercle vicieux et explique la détérioration de la condition de la personne ainsi que de sa relation avec l'autre. Chaque fois qu'elle se défile devant le risque de se porter et de s'assumer, son estime d'elle-même diminue. Mais comme elle n'est à peu près pas satisfaite malgré une grande dépense d'énergie, elle est de plus en plus en état de carence.

De son côté, l'autre finit par ne plus pouvoir supporter son harcèlement, cette demande indirecte qu'elle répète par insécurité plus que par amour. Pour lui également, cette relation sans contact émotif réel ne peut être nourrissante.


E. Conclusion


Ce qu'on appelle la "dépendance affective" est donc une forme déficiente de recherche du droit de vivre (Voir "Transfert et droit de vivre" ) . La personne reporte sur ceux qui font partie de sa vie actuelle le pouvoir de confirmer sa valeur comme personne. Comme tout individu inconscient de son transfert ou incapable de le résoudre, elle répète compulsivement des tentatives qui la mènent dans des impasses.

Pour plusieurs raisons, les besoins de cette personne sont aigus. Ce n'est pas pathologique d'avoir des besoins énormes et aigus. Ce n'est pas non plus parce que ces besoins sont criants et présents depuis longtemps (depuis l'enfance) qu'il est impossible d'y répondre. Je travaille tous les jours avec des clients qui trouvent le moyen de répondre pour la première fois à ce genre de besoins. Ils apprennent en même temps à se nourrir réellement dans leurs relations interpersonnelles.

Dans un autre article, j'explique plus précisément ce qu'on peut faire pour sortir de l'impasse de la "dépendance affective". Avant d'y accéder, je vous propose une réflexion qui permettra de cheminer sur cette question.


F. Comment vous servir de ce texte


Comme tout le monde, vous avez besoin d'être aimé et reconnu comme valable. Je vous propose de réfléchir aux questions ci-dessous. Que vous pensiez être "dépendant affectif" ou non importe peu: les réponses à ces questions sont au coeur de la qualité de votre vie.
 

  • Quels sont les moyens que vous prenez pour répondre à votre besoin d'être aimé?

  • De quelle façon faites-vous voir ce besoin aux autres?

  • Quels sont les résultats que vous obtenez habituellement?

 

On peut comprendre comment les personnes dites "dépendantes affectives" arrivent à se dissimuler aux autres ainsi qu'à elles-mêmes. On peut voir comment le fait de se renier ainsi est aliénant, comment ces personnes sont de moins en moins "quelqu'un" et se fient de plus en plus à l'autre pour le devenir. Car c'est là une impasse majeure de la "dépendance affective."


Table des matières

  • A. Introduction
    B. L'aliénation à force de se renier
    C. Deux exemples
    D. L'aliénation au quotidien
    E. Ignorance, transfert et résistance
    F. La solution: renverser le processus d'aliénation
    G. Comment vous servir de ce texte

 

Vous pouvez aussi voir:
Vos questions liées à cet article et nos réponses !
A. Introduction


Dans l'article précédant celui-ci, "Dépendance affective et besoins humains", j'ai expliqué que ce n'est pas le fait d'être dépendantes qui maintient les personnes dites "dépendantes affectives" dans des relations peu nourrissantes et débouchant sur des impasses. C'est le fait de "faire porter la responsabilité" de leur satisfaction et de leur évolution psychique aux autres. En d'autres mots, elles désirent être aimées, acquérir une valeur, avoir le droit d'être elles-mêmes, mais sans assumer l'existence de ces besoins. Au contraire, elles les dissimulent en espérant que l'autre leur procure ce qu'elles recherchent.

Cet évitement fondamental les amène à toutes sortes de comportements dysfonctionnels et parfois même aberrants. C'est cet évitement qui, à la longue, peut devenir pathologique parce qu'il les empêche de se nourrir réellement dans leurs relations et rend même impossible d'y évoluer. C'est cet ensemble de comportements dysfonctionnels que j'appelle "la dépendance affective".

Je tenterai dans ce texte de faire comprendre comment les personnes dites "dépendantes affectives" arrivent à se dissimuler aux autres ainsi qu'à elles-mêmes. J'essaierai de faire comprendre comment le fait de se renier ainsi est aliénant, comment ces personnes sont de moins en moins "quelqu'un" et se fient de plus en plus à l'autre pour le devenir. Car c'est là une impasse majeure de la "dépendance affective."


B. L'aliénation à force de se renier


La personne "dépendante affective" est à la recherche de son droit à l'existence. (Voir "Dépendance affective et besoins humains" et "Transfert et droit de vivre" ) Mais elle effectue cette recherche d'une manière déficiente. Comme toute personne à la conquête de son droit d'être, elle souhaite être aimée, acceptée telle qu'elle est. Elle désire qu'on prenne soin d'elle et même parfois qu'on la prenne en charge, preuve ultime de son importance. (Si elle cherche aussi à être désirée, ce n'est pas par besoin d'être confirmée comme être sexué, mais encore comme preuve qu'elle est aimable et valable.)

Encore une fois, ce ne sont pas ses besoins qui constituent un problème mais bien le fait de dissimuler les enjeux fondamentaux de la relation. Son droit d'exister étant précaire, elle se retrouve souvent et facilement dans une relation transférentielle, occupée essentiellement à cette recherche. Comment nourrir ce besoin impérieux d'être aimée et confirmée tout en le cachant à son interlocuteur? C'est le drame vécu par la personne dite "dépendante affective". Elle choisit malheureusement une solution qui devient vite un mode de vie: l'aliénation de soi.

Être aliéné c'est n'être plus tout-à-fait soi-même. On devient graduellement aliéné à force de s'abstenir d'être soi, à force de renier sa réalité vécue. On peut en venir à avoir l'impression que le "vrai soi" n'est pas présent dans sa relation avec les autres.

Il y a différentes manières de se renier. Ignorer ce que je vis (ma colère, par exemple) en est une. Agir à l'inverse de ce que je ressens en est une autre (je suis triste mais je souris). Banaliser ce que je ressens ou perçois en est une autre ("ce n'est pas grave, d'autres vivent des choses pires que ça"). Renoncer à mon propre jugement, faire davantage confiance au jugement de l'autre qu'au mien, refuser de regarder ma réalité en face... Les textes de Jean Garneau "Fidèle à moi-même" et "À quoi servent les émotions" sont très instructifs sur ce sujet.

Il peut paraître étrange de parler d'aliénation de soi chez une personne qui recherche avidement l'amour, comme c'est le cas du "dépendant affectif". N'est-il pas paradoxal de dire que cette personne se renie?

L'affirmation prend, au contraire, beaucoup de sens si on considère que cet individu, dans ses tentatives d'obtenir l'amour, tient très peu compte de ce qu'il vit, ignore une partie de ce qu'il perçoit, agit à l'encontre de ce qu'il ressent, sacrifie des choses qui sont importantes pour lui,. On peut dire que le "dépendant affectif" s'efforce de "ne pas exister" pour donner la place à ceux dont il veut être aimé. L'aliénation peut même devenir une caractéristique de son mode de vie.

Voyons à travers deux exemples, comment se manifeste cette aliénation de soi.


C. Deux exemples


1. Les malheurs de Julie

Julie ne comprend pas pourquoi elle se lie régulièrement à des hommes qui ne l'aiment pas vraiment, qui ne sont là que pour le sexe et que pour l'exploiter. La relation commence toujours de la même façon: l'homme est fou d'elle et impressionné par elle. Elle est alors transportée de joie et pense qu'elle a enfin trouvé "l'homme de sa vie".

Julie occupe un poste en vue. Elle est très à l'aise financièrement et possède ses entrées dans les groupes à la mode. Malgré sa popularité et son succès professionnel, elle n'est pas très sûre d'elle. Intellectuellement elle se sait intéressante, mais elle n'a pas cette conviction "dans ses tripes". Elle est très sensible au rejet et chaque rupture (elles sont nombreuses) l'atteint au plus profond d'elle-même: "il n'y a rien à faire, je ne suis pas aimable, personne ne voudra jamais de moi."

Avec ses amants elle est généreuse; elle leur ouvre les portes dans la société et les comble de cadeaux. Elle demande peu pour elle, sinon qu'ils l'aiment. De ses attentes, elle ne parle jamais car elle considère que "faire voir son besoin d'amour, c'est quêter". Alors, elle profite des relations sexuelles pour puiser des miettes de tendresse, obtenir des caresses qu'elle s'efforce de décoder comme affectueuses. Elle rêve d'être parfois bercée par ses amants, se sent, au fond comme une enfant (l'image tranche tellement à ses yeux avec celle de la femme qui réussit professionnellement!). Elle est convaincue que les hommes qui auront accès à ses fantaisies et démasqueront "ce besoin d'enfant" la quitteront sur le champ.

Elle oublie qu'ils la quittent de toutes façons! Un jour, quand elle se décide à devenir un peu plus exigeante quant à la place qu'elle prend dans la relation, quand elle ose être davantage elle-même, ils la quittent. Sans tambour, ni trompette, ils s'effacent doucement... elle n'a jamais d'explication et ne comprend pas bien pourquoi tout est soudain fini.


2. La prison de Bruno

Bruno a choisi il y a longtemps d'être un "gentil garçon". Adulte, il perpétue cette stratégie pour atteindre le même objectif: être aimé. Docile et accommodant il ne se fâche jamais. Tout semble aller bien dans sa vie: en famille comme au travail. En apparence, une seule chose fait défaut: il est aux prises avec une phobie envahissante qui prend de plus en plus de place avec les années. Tout endroit le moindrement fermé déclenche chez lui une grande angoisse. Il se sent "enfermé", "prisonnier". Il craint d'être en proie à la panique et de tout casser pour se sauver.

Bruno est sensible. Il montre peu cet aspect de lui, sauf à travers les services qu'il est toujours prêt à rendre et dans sa relation avec Rembrandt, son vieux Berger allemand. Les remarques de son père, durant sa jeunesse, lui ont fait croire que seuls les faibles montrent leurs sentiments. Aujourd'hui il se conduit en "homme affectivement indépendant". Seulement il n'arrive pas à être tout à fait indépendant: en tant que "phobique", il doit compter sur ses proches pour lui éviter les situations susceptibles de déclencher une crise de panique. Affectivement il se présente comme un homme "au-dessus de ses affaires" mais dans les faits, il vit comme un handicapé.


D. L'aliénation au quotidien


Julie et Bruno ont toute l'information nécessaire pour comprendre leur malheur et pour en sortir. Seulement, ils ne font pas suffisamment confiance à leur expérience pour s'y arrêter et en tenir compte. Chaque jour, ils ont des sentiments, des perceptions, des impulsions, des réactions. Ils font même, la nuit, des rêves qui pourraient les éclairer sur ce qu'ils vivent (s'ils voulaient prendre la peine de les considérer).


Les constats que Julie ignore systématiquement .

  1. Son amant (comme les précédents) est avare d'affection et de gestes de tendresse.

    (Julie considère cette information comme secondaire puisqu'il se montre passionné.)
     

  2. Il a parfois des réactions qui la mettent mal à l'aise et la laisse perplexe. Malgré qu'il se dise admiratif, elle perçoit parfois des réactions méprisantes. Des remarques, sur ses seins, par exemple, inutiles et dégradantes. L'impression, à certains moments, d'être exploitée ou qu'il profite de sa situation.

    (Julie ne veut pas s'arrêter à cette information. Elle craint de lui en vouloir et de s'éloigner de lui.)
     

  3. Elle est convaincue de ne pas recevoir autant qu'elle donne.

    (Quand elle pense à cela, Julie repousse un sentiment rageur. Mais elle se console en se disant que lorsqu'il l'aimera davantage, il changera. Elle trouve toutes sortes de raisons pour justifier l'égocentrisme de son amant: il passe un moment difficile, il n'a pas été gâté dans la vie, il a eu une enfance malheureuse...

    Julie a une autre série d'explications pour justifier le déséquilibre dans la relation: elle se considère comme trop exigeante. Elle a trop besoin d'amour, personne ne peut lui donner ce qu'elle souhaite, c'est à elle de changer ses attentes.)
     

  4. Ses rapprochements sont souvent refusés sous prétexte qu'ils sont désagréables. Il la dit "collante", lui reproche de s'agripper...

    (Elle n'accorde pas d'importance à cette information, même si elle est bouleversée de l'entendre. Elle retrouve alors un certain calme en se répétant qu'il est normal que son amant n'apprécie pas ses gestes d'affection, car il n'est pas affectueux de nature.
     

  5. Elle sait qu'elle lui "arrache" des faux "je t'aime".

    (Elle ne tient pas compte de cette information, ni de celle que pourrait lui donner le sentiment amer qu'elle éprouve à ces moments-là. Elle se dit qu'un faux vaut mieux que rien du tout.)
     

  6. Concernant sa propre personne, elle n'est pas non plus tout à fait inconsciente. Elle sait qu'elle emploie toujours la même tactique de séduction parce que c'est dans les rapports sexuels qu'elle a le plus confiance en elle. Sur ce terrain, elle se sait capable d'être satisfaisante. Lorsqu'elle séduit un homme, elle s'affiche comme une femme "au-dessus de ses affaires" ou même comme une "vamp". Elle camoufle complètement son besoin d'affection; ce n'est que lorsque la relation est un peu mieux établie qu'elle ose montrer cet aspect d'elle.


Les dénis de Bruno
 

  1. Son épouse est froide et souvent dure avec lui, à peu près de la même façon que son père l'a été et l'est encore.

    (Il ne veut pas s'arrêter à ce fait, ni à la peine et la déception qu'il déclenche. De plus, il déteste le sentiment d'échec qui émerge à ces moments-là.)
     

  2. Son épouse est capricieuse et égocentrique. Les choses doivent se passer à sa façon et elle a l'habitude d'ignorer les préférences de Bruno.

    (Il ferme toujours les yeux sur son irritation à ce sujet. Il considère que s'il réagit, la discussion n'aura pas de fin et il sortira sûrement perdant.)
     

  3. Il a souvent l'impression de ne pas compter, sinon pour payer les factures.

    (Il repousse systématiquement cette impression qui, chaque fois, le met en rage. Il ne peut s'empêcher de penser que sa femme ne l'aime pas. Chaque fois, il repousse cette idée en se disant qu'il se trompe sûrement. Alors, il pense aux premiers temps de leur relation et se dit que cela reviendra dès qu'elle vivra moins de stress.

    De toutes façons, il ne peut pas envisager de vivre sans elle car il se trouve trop handicapé avec sa phobie. En fin de compte, il se dit qu'il est peut-être lourd pour elle. Ce n'est pas facile d'aimer un homme dont les activités doivent être aussi restreintes.

    Ce que Bruno oublie, c'est que sa phobie est justement le symptôme qui découle du fait qu'il se renie systématiquement. C'est après des moments où il s'est renié que le symptôme est le plus vif. Typiquement, après une altercation où il a baissé la tête, il est incapable d'aller dans un lieu public.)
     

  4. À chaque concession pour éviter de "faire des vagues", il éprouve d'abord de la colère qu'il tente de masque dans l'impassibilité. Peu de temps après, il se sent déprimé.

    (Le médecin lui a donné des cachets contre cela. C'est la solution dont il se sert pour se neutraliser dans ces moments-là..)
     

  5. Chaque fois qu'il s'abstient de se respecter, il n'est pas fier de lui.

    (Lorsque cela se produit il s'efforce de penser à autre chose, ce sentiment est vraiment trop pénible.)
     

  6. Il se rend compte que le fait d'être toujours très gentil ne lui gagne pas l'estime tant souhaitée de son père.

    (Il essaie donc de renoncer à l'obtenir de son père, mais constate qu'il n'y arrive pas.)


Julie et Bruno n'ont pas besoin de fouiller profondément leur expérience pour faire les constats rapportés plus haut. Ils ont continuellement accès à ce vécu qui n'est aucunement "inconscient".

Ils se comportent toutefois comme s'ils voulaient nier la réalité qu'ils vivent. Ils attendent qu'une autre réalité s'y substitue à force d'efforts et de don de soi. Ils espèrent une réalité qui leur épargnerait la nécessité d'être complètement eux-mêmes, c'est-à-dire d'avoir à se respecter. ("Si l'autre devinait, si l'autre me donnait ce dont j'ai tant besoin! Si l'autre était différent, si l'autre pouvait changer!")

Ayant toutes les informations à leur disposition pour expliquer à la fois leur insatisfaction chronique et leurs impasses, on peut se demander pourquoi Bruno et Julie ne sortent pas de cette dépendance affective qui les annihile. On peut se demander pourquoi ils attendront d'être "au bout de leur corde" pour se séparer et recommencer un scénario semblable avec un autre partenaire.


E. Ignorance, transfert et résistance


La solution qui permet de sortir de ce scénario absurde est difficile à adopter car le "dépendant affectif" doit faire exactement l'inverse de ce dont il a l'habitude. Il lui faut faire de la place à son expérience et la respecter. Ce n'est évidemment pas sa façon "normale" d'agir et il ignore que c'est par ce chemin qu'il construira sa solidité.

Mais même s'il sait que c'est de cette manière qu'il s'en sortira, il a tendance à y résister car c'est pour lui un chemin très difficile. Amorcer un virage dans cette direction lui demande donc un grand courage et un encadrement thérapeutique est loin d'être un luxe pour lui. C'est souvent la conviction du thérapeute quant au chemin à prendre qui lui permettra de trouver le courage de s'engager dans la nouvelle voie. La psychothérapie est d'autant utile que le "dépendant affectif" tentera de reproduire un scénario semblable avec le psychothérapeute.

On pourrait chercher à expliquer les impasses des "dépendants affectifs" par le fait qu'ils choisissent des partenaires incapables de répondre à leurs besoins. Pourquoi Julie choisit-elle toujours des hommes qui sont si peu affectueux? Pourquoi Bruno a-t-il épousée une femme froide qui se montre dure avec lui?

Si on comprend la logique du phénomène du transfert, on comprend que chaque personne choisit le partenaire qui lui permet de travailler sur les cibles les plus importantes pour sa croissance psychique. Julie choisit des hommes avec lesquels il est difficile de faire place à ses besoins d'affection. Elle les choisit justement pour cela (sans le savoir clairement). Aussi, son travail consiste-t-il à oser assumer devant eux cet aspect d'elle- même. Elle n'est d'ailleurs pas attirée par les hommes doux et aimants. Elle les trouve ennuyeux et insipides.

Il en est de même pour Bruno qui n'ose pas s'abandonner à son besoin de tendresse. Il choisit une épouse avec laquelle le défi d'assumer cet aspect est aussi difficile qu'il l'est avec son père. Ce dernier et son épouse sont donc deux personnes fort appropriées avec lesquelles conquérir son droit à l'existence.


F. La solution: renverser le processus d'aliénation


On peut donc imaginer que pour sortir de la "dépendance affective" Julie et Bruno devront renverser le processus d'aliénation. Voici un aperçu du cheminement qui permet de le faire. Je commence par Bruno parce que son symptôme plus précis rend les explications plus simples.

Dès qu'il choisira de s'arrêter sur sa phobie plutôt que de la combattre, Bruno aura accès à plusieurs indices de son insatisfaction. Rapidement il deviendra convaincu que ses phobies sont un symptôme. Il verra comment ce dernier tente de l'informer qu'une dimension importante de sa vie ne lui convient pas. (Voir: "La phobie démystifiée" ). La recrudescence de sa phobie, à certains moments, sera pour lui le signe qu'il suffoque dans cette vie de gentil-jeune-homme-prêt-à-tout-endurer-pour-être-aimé.)

Dès qu'il accueille son angoisse plutôt que de la chasser, Bruno a accès à un sentiment qui traduit toujours la même impression: "il n'y a pas de place pour moi dans ma vie!" Il est clair aussi pour lui qu'il doit se nier pour être constamment gentil. Il ne compte plus les fois où il aurait pu sortir de sa gentillesse pour se manifester clairement. Combien de fois il aurait dit à sa femme qu'elle le blesse en le dévalorisant. Combien de fois il aurait refusé de lui faire plaisir juste après qu'elle l'ait attaqué? Combien de fois a-t-il eu l'impulsion de révéler à son père sa peine immense devant son indifférence?

Il se rend compte aussi que tout ce renoncement à être lui-même ne lui procure pas l'estime qu'il cherche à obtenir de son père. Il s'aperçoit que ses tactiques pour être aimé ne lui procurent pas l'amour recherché. Comble d'absurdité, il voit bien qu'il se traite lui-même comme indigne d'estime en se comportant ainsi.

Julie devra faire un travail semblable. Elle devra s'arrêter à son expérience pour s'informer correctement de ce qu'elle vit. Elle et Bruno devront traiter leur expérience autrement qu'il ne le font jusqu'à maintenant s'ils veulent sortir de la "dépendance affective".

C'est dans un autre texte que nous verrons d'une manière concrète comment se déroule cette démarche, celle qui fera de nos deux protagonistes, des êtres plus solides, qui se portent davantage et gagnent graduellement l'estime d'eux-mêmes.

En attendant, je vous propose une réflexion qui vous permettra de continuer de cheminer sur cette question.


G. Comment vous servir de ce texte


Les changements que je propose pour sortir de l'aliénation propre à la "dépendance affective" ne sont pas faciles à réaliser. D'ailleurs, il n'y a pas que ceux qui se considèrent "dépendants affectifs" qui ont des difficultés sur ces points. C'est difficile et exigeant pour chacun d'entre nous.

Que vous pensiez être "dépendant affectif" ou non, vous pourrez voir plus clair sur la qualité de vos relations en pratiquant ce que je propose ci-dessous. Il suffit de vous questionner sur les aspects de votre expérience que vous repoussez.

Qu'est-ce que j'ignore, repousse, neutralise, banalise avec les personnes à qui j'accorde le plus d'importance (mon conjoint, mon patron, mon enfant, mon meilleur ami, mes parents).

Le syndrome de Peter Pan

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